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Que fait Apple de ses achats de logiciel ? Que va devenir Pixelmator ?

Par Nicolas Sabatier - Publié le

Après le rachat de Pixelmator, nous pouvons nous demander quel sera l’avenir pour le développeur lituanien. Revenons sur les précédents achats de logiciel d’Apple pour nous faire une idée précise.

Que fait Apple de ses achats de logiciel ? Que va devenir Pixelmator ?


Garder en l'état



La première solution est la plus simple : Apple achète Pixelmator afin d’intégrer ses applications dans son écosystème. Pixelmator Pro et Photomator pourraient alors être disponibles gratuitement pour tous les utilisateurs sur iOS et macOS. Il y a un précédent avec l’application Shazam qui a été achetée en 2018. Elle est restée presque inchangée depuis le rachat, à peine a-t-on eu des ajouts dans le système iOS afin de l’appeler avec Siri par exemple.

Cependant, cela est peu probable que cela se passe ainsi. Shazam est l’une des rares applications qu’Apple n'a pas vraiment modifié, sans même changer son nom.

Que fait Apple de ses achats de logiciel ? Que va devenir Pixelmator ?


Une nouvelle application



Apple pourrait continuer le développement de certains logiciels de Pixelmator pour les proposer sous une autre forme. Par exemple, pourquoi ne pas renommer Pixelmator Pro en Photos Pro pour ainsi avoir un logiciel plus puissant que Photos ?

Il est arrivé à Apple d’acheter des applications pour un besoin spécifique. En 2000, l’entreprise a fait l’acquisition de Soundjam, un logiciel de gestion de fichiers MP3. Cette acquisition visait à accompagner le lancement imminent de l’iPod qui avait besoin d’une telle application pour synchroniser les morceaux de musique du Mac avec le lecteur MP3 d’Apple. Après quelques changements, notamment esthétiques, Soundjam se transformera pour sortir sous le nom d’iTunes.

Soudjam qui deviendra ensuite iTunes.
Soudjam qui deviendra ensuite iTunes.


De même, en 2017, Apple achète Workflow. Le développement est continué en interne pour ensuite devenir l’application Raccourcis.

Un nouveau service



Apple a souvent acheté des applications pour créer des services associés dont elle a besoin. Cela permet à la firme américaine de pouvoir concurrencer à moindres frais en achetant une entreprise qui propose un produit existant. De plus, comme Apple est connu pour ne pas être la meilleure concernant le développement de services, cela lui permet de se renforcer dans cette partie de l’entreprise qui manque cruellement d’expertise.

On peut citer le rachat de Texture qui deviendra Apple News+ en 2018, Primephonic qui reviendra sous le nom d’Apple Music Classical ou encore Beats qui est racheté en partie pour son application de streaming qui sera la fondation d’Apple Music.

Jimmy Iovine, Tim Cook, Dr Dre et Eddy Cue tout sourires avec le rachat de Beats par Apple.
Jimmy Iovine, Tim Cook, Dr Dre et Eddy Cue tout sourires avec le rachat de Beats par Apple.


Intégration dans le système



Cupertino peut aussi acheter une entreprise pour intégrer ses technologies dans ses différents systèmes. Cela a été le cas pour Darksky en 2020 qui devait permettre à Apple d’avoir des prévisions météorologiques de meilleure qualité (en théorie, dans la réalité cela ne s’est pas réalisé, loin de là).

De même, Siri était au départ une application présente dans l’App Store avant d’être achetée et d’être intégrée dans les différents systèmes.

Le Siri original à sa sortie.
Le Siri original à sa sortie.


De plus, nous pouvons penser aussi à tous les achats concernant l’AR et la VR qui ont été déterminants dans le développement de l’Apple Vision Pro. Enfin, on peut aborder la sécurité avec l’intégration d’Authentec qui a permis la création de Touch ID en 2012 ou encore PrimeSense, en 2013, qui permettra la création de Face ID.

Acquirehire



L’embauche de talents est un vrai problème pour toutes les sociétés de la Silicon Valley. Elles se font une concurrence féroce et il n’est pas rare que des ingénieurs reçoivent des offres d’emploi de Google, Facebook, Apple et d’autres. On en voit aussi papillonner d’un géant de la tech à l’autre, au gré des offres mirobolantes.

Les géants de la tech se font une concurrence sans merci pour embaucher les meilleurs ingénieurs.
Les géants de la tech se font une concurrence sans merci pour embaucher les meilleurs ingénieurs.


C’est d’autant plus le cas pour Apple qui a tendance à sous-payer ses employés par rapport à ses concurrents et à peu accepter le télétravail. Ce qui est problématique quand on sait les difficultés pour se loger dans la Silicon Valley.

Une des façons d’attirer des ingénieurs est tout simplement d’acheter leur société. C’est ce qu’on appelle en anglais acquihire : fusion des mots acquisition et embauche. Dans ce cas, la société et ses produits n’ont que peu d’intérêt. Ce qui est primordial, c’est à travers ce processus d’embaucher des personnes de qualité.

Les frères Dailide, fondateurs de Pixelmator.
Les frères Dailide, fondateurs de Pixelmator.


Dans le cas de Pixelmator, cela pourrait être le cas. Apple pourrait mettre au travail les développeurs lituaniens sur des applications et services existants pour les améliorer. En ce qui concerne les applications de la société Pixelmator, elles pourraient alors tout simplement disparaître. On peut alors imaginer les développeurs travailler à améliorer l’application Photos qui n’a pas beaucoup évolué depuis des années, en y intégrant des technologies de Pixelmator Pro et de Photomator.

Leur expertise, notamment en ce qui concerne les retouches photos boostées à l’IA et au machine learning, pourrait être un ajout primordial pour les applications d’Apple.

Le retour d’Aperture ?



Que fait Apple de ses achats de logiciel ? Que va devenir Pixelmator ?


En 2015, Apple décide d’abandonner le développement du logiciel de gestion de photo professionnel Aperture, laissant le champ libre à Adobe avec son Lightroom sur le Mac.

Or, il se trouve que de plus en plus de clients d’Adobe sont très mécontents du comportement de l’éditeur et cherchent activement une alternative. Les succès d’Affinity et de Figma en sont un exemple parmi tant d’autres.

Historiquement, Apple était la plateforme pour les créatifs, en particulier pour tout ce qui touche aux traitements de l’image. Rappelons que Photoshop est sorti en premier sur le Mac en 1990 !

Photoshop 1.0
Photoshop 1.0


Apple a perdu au fur et à mesure le marché des professionnels, avec l’abandon d’Aperture et les mises à jour problématiques comme celle de Final Cut Pro X. Sans parler des différentes versions du Mac Pro qui ont fini de faire fuir les utilisateurs les plus exigeants face aux hésitations de Cupertino.

Mais où va le Mac Pro ?
Mais où va le Mac Pro ?


Mon pronostic



Alors, quelle sera la destinée des logiciels développés par les équipes de Pixelmator ? Je pense que ce sera un petit panaché de tout ce qui a été décrit précédemment.



Nul doute que ce rachat est, en partie, une acquihire. Apple semble en permanence confrontée à un manque de développeurs, avec des applications qui peuvent rester des années sans évolutions notables. Comme si Cupertino avait une réserve de personnes limitée qui passent d’applications à applications selon les besoins, au lieu d’avoir des développeurs dédiés pour chaque logiciel. Ainsi, on peut imaginer les programmeurs de Pixelmator aider au développement de Photos sur les différentes plateformes. Certaines technologies de Photomator seront alors intégrées, notamment celles associées à l’IA et au machine learning pour la retouche de photos.

Que fait Apple de ses achats de logiciel ? Que va devenir Pixelmator ?


Je pense aussi qu’on peut voir le logiciel Pixelmator Pro soit continuer tel quel, soit renaître sous un autre nom, comme par exemple Photos Pro (destinée donc soit à la Shazam, soit à la Workflow). Cela permettrait à Apple de proposer une alternative à Photoshop et d’essayer de plaire au public des professionnels, si c’est encore possible.

Cela rappellerait alors la stratégie de reconquête d'Apple lors du retour de Steve Jobs. La société avait alors acheté Final Cut en 1998 ainsi que Logic en 2002 pour positionner le Mac comme une plateforme aussi pour les professionnels.