Virée à cause d’un emoji ? Le tribunal dit non
Par Vincent Lautier - Publié le
Licenciement pour un emoji de soutien contesté
L’affaire remonte à décembre 2022. Une chargée de qualité de la société Âges et Vie Gestion, spécialisée dans l’accueil des personnes âgées, est licenciée pour faute grave. La direction lui reproche d’avoir réagi avec un emoji
solidaire(un personnage tenant un cœur) à une publication d’une ancienne salariée dénonçant des manquements supposés de l’entreprise envers les résidents. L’acte est jugé par l’employeur comme dénigrant et contraire à l’intérêt de la société, justifiant, selon eux, une sanction disciplinaire. Après une mise à pied initiale, la direction demande et obtient, contre toute attente, l’autorisation de l’inspection du travail pour procéder au licenciement.
Une affaire portée devant la justice
Estimant que la sanction était disproportionnée, la salariée décide de contester cette décision en justice, invoquant son droit à la liberté d’expression. Selon elle, sa réaction sur les réseaux sociaux n’a pas atteint un degré de gravité justifiant un licenciement pour faute lourde. Elle fait également valoir que l’ampleur de cette réaction était limitée, car le message était publié sur un compte Facebook privé. En contestant ce licenciement devant la justice, elle soulève ainsi la question du droit de l’employeur à encadrer ou restreindre les interactions privées de ses salariés sur les réseaux sociaux.
Un jugement en faveur de la liberté d’expression
Le tribunal administratif de Besançon a tranché en faveur de la salariée. Selon le jugement, l’usage d’un emoji dans le contexte d’une publication diffusée à un cercle restreint ne constituait pas un acte de dénigrement grave. Le tribunal considère que l’acte n’a pas eu d’impact notable sur la réputation de l’entreprise, d’autant plus que la salariée n’était pas identifiable en tant que membre de l’organisation. La juridiction annule donc l’autorisation de licenciement accordée par l’inspection du travail en 2023, reconnaissant que cette mesure portait atteinte à la liberté d’expression de l’employée.
Une indemnisation symbolique
À la suite de cette décision, l’État versera une indemnité de 1 500 euros à la requérante. L’affaire suscite néanmoins des questions sur la gestion des réactions en ligne des salariés et leurs éventuelles conséquences disciplinaires. La décision du tribunal rappelle la nécessité, pour les employeurs, de mesurer les actes jugés
déloyauxou nuisibles à l’entreprise et d’en évaluer les impacts réels avant de prononcer des sanctions aussi lourdes.
Quel est votre avis sur cette affaire ? Parlez-vous parfois négativement de votre travail sur les réseaux sociaux, ou êtes-vous particulièrement prudent pour éviter les problèmes ?