iOS 16 : CarPlay est-il un Android Automotive déguisé ? (Le futur carOS)
Par Didier Pulicani - Publié le
Jusqu'à présent, CarPlay agissait comme un miroir du téléphone : il permettait de lancer des applications avec une interface adaptée à la conduite, souvent simplifiée. En pratique, il s'agit toujours d'apps iOS, exécutées sur l'iPhone, mais avec un écran externe : cela explique les surchauffes régulières lors de l'utilisation de Waze ou de Google Maps, alors que l'appareil tente de se charger sur un pad sans-fil. Pour peu qu'il se trouve au soleil ou dans une coque en cuir, l'iPhone refuse même parfois de fonctionner...
Celle nouvelle version va beaucoup plus loin, puisque CarPlay souhaite se substituer totalement au système embarqué :
- affichages des compteurs de vitesse
- données du véhicules (odomètre, charge, consommation...)
- gestion multimédia (radio, haut-parleurs...)
Si Apple se garde bien de fournir les détails technique au public, on imagine que l'intégration s'annonce complexe du côté des constructeurs. Actuellement, la compatibilité CarPlay exige la présence de hardware spécifique et d'un échange de données (comme les coordonnées GPS), ou encore le niveau de batterie, l'affichage jour/nuit etc. bref, ça ne fait pas très loin. Apple peut dès lors très bien changer les interfaces ou les applications du jour au lendemain, sans en référer aux constructeurs -c'est l'iPhone qui mène la danse.
Dans cette nouvelle version, l'intégration semble plus poussée. Déjà, il est y a l'ensemble des données, spécifiques à chaque voiture : en fonction des options, CarPlay devra parfaitement accéder aux fonctions de la voiture -imaginer la climatisation qui n'est pas à bonne température ou une porte qui ne soit pas bien fermée ! Cette fois, la validation du fonctionnement de CarPlay nécessitera un travail poussé entre Apple et chaque marque de voiture et la Pomme ne pourra pas pousser de mise à jour sans l'aval de Renault, Volvo ou Polestar.
Sur le plan des performances maintenant, il ne serait pas aberrant d'imaginer qu'une partie du système tourne déjà dans la voiture, pour gérer notamment l'accélération graphique voire même le lancement de certaines applications. Il ne s'agit pour le moment que de simples suppositions, mais l'affichage des compteurs, du sélecteur de vitesses, du GPS ou de données critiques, exigent de la fiabilité et du répondant : si l'iPhone redémarre, plante ou chauffe, le conducteur peut se retrouver dans la panade. Je ne parle même pas des fonctions de sécurité (autopilot, angles morts, message d'arrêt d'urgence...) qui peuvent directement mettre en danger les passagers en cas de défaillance d'affichage.
Mais le plus intriguant concerne les constructeurs associés : une bonne partie (Volvo, Polestar, Renautl...) sont déjà maqués avec Google et son système Android Automotive. D'autres, comme Mercedes ou LandRover, ont beaucoup investi dans leur OS maison et ne semble pas prêts à le déléguer à un tiers.
Si le contrat avec Google n'est peut-être pas exclusif, il est envisageable que les constructeurs n'offrent qu'une petite partie de leur écran à CarPlay. Par exemple, pouvoir simplement gérer les commandes basiques (climatisation, radio...) sans aller jusqu'à l'instrumentation ou le contrôle des ouvrants ou des fonctions de sécurité routières. Aujourd'hui, un planificateur d'itinéraire (ChargeMap, ABRP...) n'a pas (encore) la posssibilité d'accéder aux données précises du véhicules (trajet, consommation, niveau précis de la batterie...), mais cette nouvelle version pourrait débrider un peu ces usages -ce qui arrangerait bien les constructeurs, sans aller trop loin dans les fonctions vitales de la voiture. Autre atout pour Apple, la firme mise beaucoup sur la confidentialité des données, ce qui est moins le cas de Google : avoir le choix côté client peut devenir un argument commercial.
Bref, avec cette nouvelle version de CarPlay, Apple s'enfonce toujours plus loin dans l'intégration automobile et vient gentiment taquiner Google, que l'on pensait pourtant bien installé chez les constructeurs avec Android Automotive. Il faudra toutefois que les éditeurs de ce nouveau CarPlay puissent proposer des applications plus abouties qu'actuellement pour venir réellement défier le géant de la recherche : ce ne sont pas 2 ou 3 widgets de consommation de carburant qui vont remplacer Netflix, YouTube, Google Maps ou encore tous les jeux qui devraient arriver chez Android Automotive ces prochaines années.
Quant à ceux qui voient ici les prémices de carOS, un système embarqué dans la futur Apple Car, il faut avouer qu'on serait bien tenté par l'idée...