Connecteurs, câbles et signaux vidéos
Par Contributeur - Publié le
Les années 90 : VGA, ou l'âge d'or de l'analogique
Au commencement, il n'y avait rien.
Puis, en 1987, IBM invente le VGA (Video Graphic Array) : une norme d'affichage, et surtout un connecteur dédié qui allait défier le temps ! Passons rapidement sur les spécifications initiales de la norme d'affichage qui laissent rêveur (une résolution montant jusqu'à 640x480 pixels, 256 couleurs différentes simultanément affichées...).
La prise utilisée pour relier la carte graphique de l'ordinateur au moniteur allait régner en maître pendant deux décennies (elle est toujours très présente en 2009) dans le monde de l'affichage informatique.
Le connecteur est de forme trapézoïdale, généralement en plastique de couleur bleue. Les signaux électriques transportant l'image de manière analogique (par les variations du courant circulant dans le câble) sont répartis sur 15 contacts électriques, agencés en 3 lignes de 5, donnant le nom du connecteur (DE15). Attribuant le nom de la norme d'affichage au connecteur qui la véhicule, le grand public retiendra le terme "VGA" pour nommer ce connecteur dans les années suivantes.
Pendant ce temps, Apple utilise un connecteur proche mais de forme différente (DB-15), et n'adopte le connecteur VGA qu'en 1998 sur les PowerBook G3, puis en 1999 sur les Mac de bureau : PowerMac G3, et iMac G3 à partir de 400 Mhz (qui hériteront de la prise VGA en même temps que de ports Firewire).
Apple utilisera ensuite, à partir de 2002, une déclinaison physiquement réduite du port DE15 standard, appelée mini-VGA. Ce petit connecteur permettra de relier un écran VGA standard au Mac (via un adaptateur mini-VGA vers VGA) tout en réduisant la taille de la prise de sortie vidéo sur le Mac. De plus le mini-VGA propose aussi (via un adaptateur mini-VGA vers Vidéo) une sortie vidéo composite ou S-video, permettant par exemple d'afficher l'image du Mac sur une télévision, ou de l'enregistrer sur un magnétoscope vidéo (VHS).
Le connecteur mini-VGA est utilisé comme sortie vidéo de 2001 à 2006, sa taille réduite en fait un choix de premier ordre, non seulement pour les Mac portables : iBook G3 blancs ("dual USB"), puis iBook G4 et le premier PowerBook G4 12" ; mais aussi pour les modèles de bureau tout-en-un : iMac G4 et eMac G4, puis iMac G5.
1999 : DVI, ou les grands débuts du numérique
Régnant sans partage pendant plus d'une décennie, l'interface VGA commence toutefois à montrer ses limites vers la fin des années 90, au fur et à mesure de l'augmentation conjointe de la résolution des écrans, et de la qualité des cartes graphiques. En effet, l'augmentation de la résolution (taille de l'image en pixel) et du nombre d'images par seconde (taux de rafraîchissement) nécessitent une bande passante de plus en plus large, donc des fréquences de plus en plus élevées. Or le signal VGA véhiculé est analogique : les hautes fréquences sont les premières à subir des dégradations pendant le transport (selon la qualité du câble, particulièrement sur de longues distances).
De plus, les moniteurs numériques (à dalle plate) remplacent progressivement les moniteurs cathodiques, aux écrans en grosses ampoules de verre (comme la télé de grand-maman), rendant la nécessité d'une liaison entièrement numérique entre la carte graphique et le moniteur de plus en plus indispensable. En effet, maintenant qu'ordinateur et moniteur travaillent tous deux avec des signaux numériques, la liaison analogique entre les deux devient le talon d'Achille de l'affichage informatique.
C'est donc tout naturellement qu'arrive en 1999 le DVI (Digital Visual Interface, ou Interface Visuelle Numérique). Comme son nom l'indique, le DVI permet une liaison numérique (sans aucune perte ni altération lors du transport) entre la carte graphique de l'ordinateur, et le moniteur. Cependant, pour s'imposer largement sur le marché analogique existant, le DVI ne peut pas faire table rase de la décennie passée et de l'immense majorité des moniteurs cathodiques qui ne disposent que d'un connecteur analogique VGA comme seule entrée vidéo. Ainsi naquit le connecteur DVI-A ("A" comme "Analogique"), interface de transition entre analogique et numérique, permettant de transmettre les signaux analogiques (VGA) sur le connecteur DVI. Un simple adaptateur peu coûteux (et souvent fourni avec la carte graphique) permet de relier une carte graphique équipée d'un connecteur DVI-A à un moniteur analogique (à entrée VGA).
Le DVI-D (D comme Digital, c'est à dire numérique) est moins coûteux et plus simple, mais il ne transporte pas les signaux analogiques nécessaires à la rétro-compatibilité avec le VGA. Pour complexifier encore un peu la chose, le DVI numérique existe en deux déclinaisons : la version standard (single-link) qui permet de piloter des moniteurs numériques à des résolutions jusqu'à 1920]1200 pixels) et une version encore plus rapide (dual-link) pour les moniteurs de plus haute résolution, comme l'écran 30" d'Apple.
Enfin, le DVI-I est une fusion du DVI-A et du DVI-D : il véhicule à la fois les signaux analogiques et numériques.
C'est au prix de ces petites subtilités (nécessaires à la rétro-compatibilité avec le VGA) que le DVI commence à s'imposer doucement, même s'il faut attendre que les consommateurs renouvellent leurs moniteurs pour profiter de la liaison 100% numérique.
Comme elle l'avait déjà fait pour le VGA, Apple utilise une version réduite du connecteur DVI.
Successeur du mini-VGA, le mini-DVI équipe en toute logique les portables (MacBook) et les iMac (dès le passage aux processeurs Intel en 2006). Les MacBook Pro, successeurs des PowerBook, conservent leur port DVI-I dual-link de forme standard.
Là encore, les adaptateurs mini-DVI vers DVI ou mini-DVI vers VGA existent, de même que l'adaptateur mini-DVI vers Vidéo (toujours Composite ou S-Vidéo, pour relier à une télévision).
En janvier 2008, Apple présente le MacBook Air qui est doté d'un nouveau type de sortie vidéo : le micro-DVI. Techniquement similaire au mini-DVI, la prise est encore plus petite, et restera un cas unique : dès octobre 2008 ce connecteur disparaît pour être remplacé par le mini-DisplayPort sur la seconde version du MacBook Air. Tout comme pour le mini-DVI, les adaptateurs micro-DVI vers VGA, micro-DVI vers DVI et micro-DVI vers Vidéo sont vendus par Apple.
2000 : ADC, ou le DVI à la sauce pommée
En juillet 2000, Apple présente une nouvelle gamme de moniteurs LCD à entrée vidéo numérique. Voulant garder à la fois une spécificité et un temps d'avance sur les autres constructeurs, la firme à la pomme n'a pas pu s'empêcher de vouloir améliorer le DVI.
L'idée de l'Apple Display Connector est simple : réduire le nombre de câbles reliés au moniteur. L'ADC permet de faire passer dans un seul câble :
- un signal DVI
- une liaison USB (permettant d'avoir un Hub et des ports USB accessibles sur le moniteur)
- du courant électrique (25 volts) pour alimenter le moniteur
L'ADC permet également d'allumer et d'éteindre le Mac en utilisant le bouton d'alimentation du moniteur.
Le connecteur ADC restera 4 ans au catalogue d'Apple, équipant les moniteurs et les ordinateurs de bureau. Isolée avec son interface propriétaire face à la progression grandissante du DVI, Apple abandonne en 2004 l'ADC (au profit du DVI standard), ce qui permettra d'une part aux possesseurs de Mac d'utiliser des moniteurs non-Apple sans adaptateur ADC vers DVI, mais surtout à Apple d'ouvrir ses nouveaux moniteurs, considérés comme haut de gamme, au marché des PC (sans devoir acheter le coûteux adaptateur DVI+USB vers ADC).
2003 : HDMI, ou l'arrivée de la HD dans le salon
Pendant que l'informatique migre rapidement au numérique avec le DVI, le téléviseur du salon est jaloux : la prise péritel, après 30 années de gloire, de magnétoscopes VHS puis de platines DVD, n'a pas de successeur.
Le DVD passe à la Haute-Définition au début des années 2000, la Télévision Numérique Terreste est annoncée pour 2005... La problématique est similaire au monde de l'informatique : comment transporter d'un appareil à l'autre, dans la meilleure qualité possible et le plus simplement possible, des images numériques en haute définition ?
La réponse sera donc le HDMI, sorte de prise Péritel de l'ère de la haute-définition numérique :
Pourquoi ne pas reprendre tout simplement le DVI existant, pour le "Home Cinema" ? Contrairement à l'informatique où le traitement de l'image et du son sont séparés (carte son et carte graphique sont généralement indépendantes dans un ordinateur), en télévision/cinéma il est rare de regarder la vidéo d'une source et d'écouter le son d'une autre source. L'émission est généralement conjointe (image et son), qu'il s'agisse d'un support physique (DVD, Blu-Ray, ...) ou d'une diffusion (TNT, câble, ...). Le HDMI, comme la prise péritel, laisse transiter non-seulement la vidéo (façon DVI), mais également l'audio. De plus, l'industrie des producteurs et diffuseurs de contenus craint que la simplification de la connectique et la liaison tout-numérique encourage les copies non-autorisées. Le standard HDMI inclut donc une forme de verrous numériques (DRM) qui transitent dans le câble et ne sont décodés qu'en bout de chaîne, par l'écran : le HDCP, qui servira à chiffrer les données, rendant impossible toute lecture par un équipement non-autorisé.
Le HDMI est partiellement compatible avec le DVI : on trouve aisément des adaptateurs DVI vers HDMI et réciproquement. Deux bémols : d'une part le DVI ne transporte pas le son, d'autre part dans la majorité des cas le DVI ne laissera pas passer un flux protégé par HDCP : la lecture d'un disque Blu-Ray acheté dans le commerce sur un moniteur DVI n'est pas garantie...
Côté Apple, c'est le grand silence sur le HDMI (comme sur le Blu-Ray) : même si les adaptateurs mini-DVI vers HDMI existent, Apple n'en commercialise pas et ne fait que très rarement mention d'une comptabilité (pourtant avérée) entre les Mac et le HDMI
2008 : DisplayPort, ou le successeur du DVI
Le HDMI est bien imposé dans le salon, mais le DVI commence déjà à se sentir à l'étroit sur l'ordinateur : la résolution des moniteurs informatiques augmente, et l'interface atteint une fois de plus ses limites. Arrive alors le DisplayPort, sorte de HDMI adapté aux usages plus divers de l'informatique.
Compétiteurs pour les uns, complémentaires pour les autres, le DisplayPort et le HDMI partagent de nombreuses caractéristiques. Pour tenter de détrôner le (pourtant jeune) HDMI, le DisplayPort dispose d'un argument financier en sa faveur (pas de "royalties" à verser pour le fabricant, donc du matériel potentiellement moins cher et plus répandu pour le consommateur). D'un point de vue technique, le DisplayPort supporte de plus hautes résolutions que le HDMI, qui est par exemple incapable d'alimenter les 2 560 x 1 600 pixels du moniteur Apple 30". Le DisplayPort se pose donc en remplaçant du DVI dual-link.
Côté Mac, le DisplayPort est retenu comme successeur officiel du DVI depuis octobre 2008, et Apple utilise désormais -vous l'aurez deviné- une déclinaison réduite du connecteur DisplayPort (habilement nommé "mini-DisplayPort") en remplacement du DVI et du mini-DVI sur sa gamme de portables (MacBook et MacBook Pro depuis octobre 2008) et de Mac de bureau (iMac, mais aussi Mac Pro, depuis mars 2009). Attention, le mini-DisplayPort, contrairement à son grand frère, ne permet pas de sortir le son.
Le mini-DisplayPort est rétro-compatible DVI et VGA (toujours là !), mais aussi HDMI (ne le dites pas à Apple, ça les agace...). Il rompt par contre la compatibilité avec les signaux de vidéo analogique en définition standard (Composite, S-Vidéo).
L'avenir : l'inévitable fusion ?
La convergence entre télévision et informatique est amorcée depuis des années. L'époque où la télé trônait au salon et le PC restait dans le bureau est révolue : les "box" Internet font le pont entre télévision et ordinateur. Le PC s'invite de plus en plus souvent au salon pour jouer les Media Center sur l'écran de télévision, pendant qu'on enregistre la TNT afin de revoir ses émissions sur l'écran du MacBook plus tard dans le jardin ou au lit.
Les liaisons numériques ont simplifié les câbles et connecteurs, tandis que la haute-définition (BluRay, TNT HD) a rapproché la résolution télé de celle de l'ordinateur, rendant les écrans de télévision et informatiques interchangeables : les adaptateurs et câbles permettent déjà de jongler entre DisplayPort, HDMI, et même le vieillissant DVI.
Cependant, le résultat de la récente guerre entre HD-DVD et BluRay ne laisse que peu d'espoir pour une cohabitation à long terme entre HDMI et DisplayPort, deux formats de plus en plus similaires, tant dans les usages que dans les possibilités techniques (avantage pour le DisplayPort côté résolution).
Le DisplayPort, successeur du DVI sur les ordinateurs, se verrait bien devenir la prise Péritel de la génération HD numérique. Mais le HDMI, en place depuis plus longtemps dans le salon, n'entend pas tirer sa révérence si facilement...