Les grandes manœuvres d'Apple dans les réseaux de distributions de contenu
Par Arnaud Morel - Publié le
Apple, en effet, négocie, en ce moment, de grandes quantités de bande passante bloquées par le biais de contrats longue durée avec les fournisseurs d'infrastructure. La Pomme, en outre, a recruté de nombreux experts des domaines concernés, musclant outre ses capacités de distribution, sa capacité d'expertise. En point de mire de ces manœuvres, estime le Wall Street Journal, le lancement d'une offre nouvelle autour de la télévision.
Le réseau de distribution actuel d'Apple remonte à l'accord signé avec Akamai, entreprise américaine, installée à Cambridge, dans le Massachusetts, en juillet 1999. Un accord novateur, à l'époque, qui mettait en orbite les services de streaming d'Apple, propulsés par QuickTime Streaming Server. Akamai détenait, alors, 900 serveurs, répartis dans 15 pays. Aujourd'hui, Akamai compte pas moins de 250 000 serveurs, répartis dans 80 pays, et pèse autour de 20 % du trafic internet mondial. L'entreprise, récemment, indiquait être en phase de renégociation de contrats avec certains de ses gros clients, dont Apple fait vraisemblablement partie.
Si Apple témoigne de velléités d'autonomisation par rapport à son partenaire de distribution historique, c'est sans doute, déjà, pour abaisser le coût de distribution, en en maitrisant les éléments essentiels. Mais, pour cela, Cupertino a non seulement besoin de fermes de calculs, mais également d'une large couverture géographique. Optimiser la distribution de contenu exige d'être capable d'héberger les données aussi près physiquement que possible des clients. Surprise, ou pas, Apple est réputée chercher à implanter un data center à Eemshaven, à l'extrême nord de la Hollande.
Ce renforcement des capacités de distribution propres de la Pomme prend également tout son sens si l'on considère l'hypothèse TV d'Apple. Quelle qu'en soit la forme - boitier, vrai téléviseur - cette offre impliquera des capacités renforcées en matière de diffusion de streaming.
Le recrutement de Lauren Provo, en charge des
relations d'interconnexionchez Apple, une ancienne d'AT&T et de Comcast, où elle négociait les contrats de fourniture de bande passante, n'est sans doute pas sans lien avec les ambitions télévisuelles qu'on prête à la Pomme. Spécialisée dans les négociations délicates entre acteurs de l'internet et des réseaux, sur les questions de peering, Lauren ne devrait pas manquer d'occupations à Cupertino.
Et ce n'est pas le seul recrutement récent opéré par Apple dans ces secteurs. Cupertino a également embauché Jean-François Mulé, ancien vice-président de Technology Development et ancien employé de CableLabs, une joint-venture associant plusieurs des principaux opérateurs américains du câble,. L'homme est considéré comme un bon spécialiste des logiciels - transfert de données, VoIP - pour TV et Set Top Box.
Autre indice, qui plaide en faveur d'une offre TV pommée, le chemin que suit Apple en se renforçant dans les réseaux de distribution de contenus est le même qu'a déjà emprunté Netflix. La société, spécialisée dans la diffusion de films et d'émissions en streaming dépendait, elle aussi, largement du réseau Akamai, mais s'est mis à bâtir son propre réseau courant 2012, un réseau nommé Open Connect. Celui-ci assure désormais 70 % de l'acheminement des données de l'entreprise vers ses clients tandis que la facture "distribution" a nettement baissé chez Netflix.
Tout comme Rome, qui ne s'est pas faite en un jour, le réseau de distribution de contenu d'Apple prendra certainement du temps à émerger. La Pomme, d'ailleurs, n'a jamais vraiment brillé à travers ses services connectés. Mais les choses changent, doucement.
C'est une direction naturelle pour une entreprise comme Apple, mais créer son réseau lui prendra sans doute plusieurs années, analyse Aaron Blazar, vice-président d'Atlantic-ACM, une entreprise de consulting réseaux.