Si certains estiment déjà que l'Apple Watch bénéficie du pire lancement produit de tous les temps, les raisons qui poussent Angela Ahrendts à ne pas proposer de produits directement en Apple Store le jour de la sortie pourraient ne pas être seulement liées à la forte demande et/ou à des capacités de productions limitées.
Evidemment, l'idée de faire passer la vente en ligne en priorité lorsqu'un produit bénéficie d'une attente importante (et que les chaines de montage ne suivent pas) peut paraitre un bon moyen de ne pas trop frustrer les clients : les plus pressés sont orientés vers le web dans une logique premier arrivé, premier servi avec un suivi de commande complet et les boutiques, de leur côté, accueilleront les plus pragmatiques, une fois que la pression sera un peu retombée.
Un public qui se professionalise
Cependant, il nous a été soufflé que ce changement de stratégie n'était pas seulement du à des problème d'approvisionnement. Ces dernières années, avec la segmentation géographique des marchés, ces fameuses files d'attentes ne sont plus aussi bon enfant qu'à la grande époque. Faire la queue devient parfois un business, que ce soit pour de la revente à l'export ou parfois (on l'a vu !) comme coup marketing. Pour avoir fait le tour des boutiques régulièrement lors de ces lancements-produit, on a d'ailleurs pu constater que de nombreux étrangers (Italie, Espagne...) venaient souvent de très loin pour alimenter le marché noir et représentaient parfois une bonne partie des personnes sur place. On est venu à 4 dans la voiture, pour en prendre 2 de 128Go chacun ! nous informait un italien, lors de la sortie de l'iPhone 6. Avec les commandes par internet, Apple possède bien plus de capacités de filtrage et il faut obligatoirement une adresse physique locale pour commander son produit. Dès lors, tout le marché parallèle devient d'un coup, beaucoup plus complexe à mettre en place et les clients des premiers pays de lancements sont logiquement moins lésés.
Des tensions inutiles
Autre phénomène, beaucoup moins agréable pour les clients habituels et pour les vendeurs, cette course aux produits indisponibles génère des tensions et des angoisses, que le personnel n'est pas toujours en mesure de traiter efficacement. Qui n'a jamais été témoins d'agressions verbales ou physiques lorsqu'une personne tentait de passer devant tout le monde ? Dans certaines boutiques ou à leurs abords, on nous a rapporté à plusieurs reprises, un certain nombre d'incidents (vols à la tire, agressions). Avec une livraison à domicile, Apple évite ces démonstrations de violence, qui ne collent pas à l'image de la société.
Des raisons fiscales ?
Enfin, il se murmure en interne que ce lancement produit en deux temps permet de maximiser les ventes en ligne, une façon de gérer les transactions bien plus efficacement pour Apple. En effet, sur l'Apple Store, le paiement serait alors envoyé directement en Irlande, ce qui permettrait à la firme de faire transiter ces sommes loin du regard des autorités fiscales de chaque Etat. Cette théorie seraient par ailleurs corroborée par le récent lancement des nouveaux MacBook, eux-aussi absents des Apple Store durant les premières semaines du lancement.
Pour autant, il serait étonnant qu'Apple renonce à cet élan de geeks et aux retombées médiatiques générées par ces queues interminables devant les boutiques. Nous le verrons en septembre, avec l'iPhone 6s, mais il est probable qu'Angela Ahrendts planche déjà sur un compromis permettant de contenter tout le monde et de ne pas tirer totalement un trait sur ces manifestations populaires que peu de marques parviennent à générer.
