Essai Lancia Ypsilon électrique : le costume italien suffira-t-il à sauver la marque ?
Par Didier Pulicani - Publié le
Sauf revirement de situation, les futures Lancia seront principalement électriques, voire hybrides, comme c'est le cas avec cette nouvelle
Ypsilon Elettrica, une déclinaison italienne de la e208 -en effet, Stellantis réutilise une nouvelle fois sa plateforme e-CMP, également présente sur la Corsa électrique.
Lancia Ypsilon : vraiment italienne ?
Avec un moteur fabriqué en Lorraine, une plateforme née à Sochaux, une fabrication en Espagne et un nom grec... que reste-t-il de vraiment italien dans cette nouvelle Ypsilon ?
Déjà, le look ! Le design a effectivement été réalisé dans les bureau de style italiens de la marque Lancia, à Turin. L'avant rappelle le fameux calice présent sur toutes les calandres des Delta et de ses cousines, avec une signature lumineuse assez réussie -de nuit, on distingue trois rayons de lumières qui ne passent pas inaperçu. Dommage, les feux ne sont pas matrix LED, même en option -notre version dépassait quand-même les 40 000€ !
De profil en revanche, le style est plutôt... franco-allemand. Tantôt elle ressemble à une 208, tantôt à une Corsa... ce qui n'est pas forcément une mauvaise comparaison. J'aime beaucoup cette poignée arrière calée dans le haut de la portière, qui offre un style de citadine 3 portes. Toutefois, Lancia aurait pu créer ses propres rétroviseurs et ses poignées de portes affleurantes, plutôt que de réutiliser ces accessoires de 208 pas vraiment aéro.
L'arrière, plus clivant, rappelle inévitablement la Stratos, avec ces deux gros phares ronds, assez proéminents, et qui risquent d'être en première ligne en cas de choc. Malgré tout, c'est original, surtout dans ces coloris assez vifs comme ce splendide vert Giada.
Alors, elle ne sent pas un peu la pizza notre Lancia ? Une chose est sûre, durant notre essai, le public était plutôt conquis, à vérifier dans la rue ces prochains mois...
Habitabilité : comme une e208
Avec 4,09m de long (entre une R5 et une Megane), l'Ypsilon est plutôt compacte, elle reprend quasi à l'identique les dimensions de ses cousines.
Le coffre est dans la bonne moyenne avec 309L, même si l'on perd 40L face à la version thermique. Si la place vient à manquer, il faudra opter pour un coffre de toit, car la voiture ne peut pas tracter, contrairement à ses concurrente (y compris la R5).
Plateforme multi-énergie oblige, il n'y a pas non plus de coffre à l'avant (frunk), mais la chose est assez rare sur le segment. Pourtant, il y a de la place, mais un réel manque de volonté du côté du constructeur, qui n'en a pas non plus sur le E-3008 ni sur le E-5008 de la plateforme supérieure (STA_Medium)
Petite batterie, petite autonomie
S'il semble compliqué de placer une grosse batterie dans une voiture de moins de 4m10, les petits 48 kWh net (51 brut) ne semblent toujours pas suffisants pour offrir une bonne autonomie à cette plateforme.
- 403 km WLTP
- Charge DC 100 kW - 30mn
- Charge AC 11 kW
Avec 403 km WLTP, ne comptez pas faire plus de 200Km sur autoroute et environ 300 en péri-urbain. Les moteurs Stellantis ne sont pas particulièrement gourmands, mais même à 17-18 kWh au 100Km à 130Km/h, une règle de trois suffit à déduire qu'un arrêt toutes les 1H30 (chargé à 80%) sera nécessaire.
Autre bizarrerie, la pompe à chaleur est en option, la voiture n'a pas non plus de préconditionnement de la batterie. En hiver, Lancia nous assure que l'Ypsilon prend bien les 100 kW, mais il faut avouer que ces choix techniques interrogent, surtout sur un segment qui se veut plus premium.
Une traction et puis c'est tout
Comme la e208, notre Ypsilon ne propose qu'une motorisation électrique, à savoir :
• 260 nm de couple
• VMax 150Km/h
• 0 à 100 km/h en 8,2s
Pour avoir essayé l'hybride, je vous assure qu'il s'agit de la meilleure offre en terme d'agrément. Le moteur est coupleux, puissant et bien dimensionné pour la voiture. Sur les petites routes, le châssis est exemplaire, et rappelle beaucoup sa cousine au Lion, même si Lancia nous assure avoir retravaillé les cartos moteur et les suspensions.
Pas inconfortable sur route dégradée, l'Ypsilon est même assez sportive, de quoi se faire plaisir en haussant le rythme sur les petites routes. Dommage en revanche que la régénération soit aussi faible, même en mode B, ce qui oblige à taper dans les freins avant les virage.
Taillée pour les villes italiennes ?
En ville, son diamètre de braquage 9,4m facilite les manoeuvres, sa vocation première après tout.
Nous avons même une caméra de recul à 360 degrés, même s'il manque des optiques sous les rétroviseurs : Lancia utilise un astucieux système pour recréer l'image au fur et à mesure du déplacement.
Dommage, pas de conduite à un pied chez Lancia (la fameuse One Pedal) et il faudra actionner le bouton stop/start à chaque fois que l'on entre et sort du véhicule. Au quotidien, c'est assez casse-pied quand on a pris l'habitude d'une électrique, même si la plupart des clients viendront surtout du thermique et n'y feront pas trop attention.
Les jantes de 16 et 17" offrent un bon compromis pour encaisser les dos d'ânes sans être trop maltraité à l'arrière. La largeur de seulement 1,76m ne ne fait pas du tout regretter les SUV moderne de plus de 2m dans les petites ruelles du sud de la France, où nous avons réalisé notre essai.
Point d'orgue, l'insonorisation semble nettement meilleure que chez Peugeot, c'est peut-être ça la touche italienne ! Ce côté feutré est d'ailleurs certainement lié à tous les efforts réalisés à l'intérieur sur les matériaux et les assemblages, comme on va le voir...
Un salon roulant !
Pour se différencier de ses cousines l'Ypsilon n'est pas en reste, avec cet intérieur douillet au style très travaillé.
Même si l'on reconnait les commodos de Stellantis, y compris les commandes de boite, les lèvre-vitre et quelques boutons bien typiques du groupe, la plupart des éléments sont uniques à ce modèle, comme la planche de bord très épurée, dessinée par Cassina, mythique fabricant de meubles italiens.
Prenez ces sièges par exemple, en velour couleur rouille, hyper confortables et siglés Lancia. On a vraiment envie de se blottir dedans ! J'aime aussi beaucoup le volant (bien qu'un peu grand), avec son léger méplat et son rappel du passé sportif de la marque en partie basse.
La tavolilno -pardon, la petite tablette- situés au centre permet de rapidement poser ses clefs, son expresso ou ses cartes de charge, même si l'absence d'antidérapant limite rapidement l'usage. Cerains auraient préféré un double chargeur sans-fil, plutôt qu'un seul emplacement derrière la tablette, mais il est possible de caler le téléphone à la verticale sur cet espace, histoire de voire ses notifications facilement.
Les rangements sont nombreux, y compris dans l'accoudoir, les portières, et il y a même deux porte-gobelets. En revanche, pas de place pour un sac à main sous la console, comme c'est désormais l'usage. Une prise USB et 12V sont également intégrés au centre, sous la climatisation.
A noter que Lancia a conservé de nombreuses commandes physiques, un bon point dans ce monde où le tactile vire à la facilité. C'est notamment le cas pour l'air conditionné ou encore les feux de détresse -on apprécie.
A l'arrière, c'est un peu moins la Dolce Vita, avec une banquette fractionnable mais confortable. On oubliera la trape à ski et le tunnel central, en se consolant avec 2 prises USB et un bon espace aux jambes. Les très grands gabarits ne sont pas forcément bien installés, mais rien de dramatique pour le segment.
Dommage que les plastiques durs soient légion, et pas seulement en partie basse. A plus de 40 000€, notre exemplaire n'est pas aussi premium que ses cousines allemande si l'on regarde les assemblages d'un peu trop près.
Connectivité : bienvenue en 2010
De prime abord, les deux dalles de 10" orientées vers le conducteur sont plutôt flatteuses, même si l'on s'habitue maintenant à des écrans plus grands.
La police de caractères est spécifique à Lancia, qui possède même son propre assistant vocal (Sala)l, plutôt efficace dans l'ensemble, bien que l'on n'ait pas eu le temps de le tester dans le détail. Un petit cylindre situé sur le tableau de bord s'allume quand elle vous répond, là encore, c'est inédit.
L'instrumentation est plutôt claire et lisible (merci le grand volant), de quoi compenser l'absence d'afficheur tête haute, même en option. Toutes les infos sont là, de la batterie à la lecture de panneaux en passant par l'affichage en mode semi-autonome.
Mais pour le reste... c'est assez poussif. Pas de planificateur, un GPS d'un autre âge avec la réactivité d'un koala... La petitesse de l'écran oblige à utiliser de nombreux sous-menus pour trouver ses petits. Certes, on peut personnaliser l'écran d'accueil ou encore les raccourcis pour les alertes de survitesse, mais même avec ça, on passe son temps à balayer l'écran pendant la conduite.
Lancia n'a pas intégré le système sur base Android présents dans les E-3008 et E-5008, mais bien l'OS qui équipe les e208, e2008 et consorts sous E-CMP. Du coup, pas de planificateur d'itinéraire, et un OS d'un autre âge, qui manque de réactivité.
On se consolera avec CarPlay et Android Auto sans-fil, et heureusement qu'ils sont là ! Stellantis a vraiment un train de retard face à Renault et même Volkswagen, pour le coup.
Autoroute : une semi-routière
Sur voie rapide, notre Lancia Ypsilon est plutôt à l'aise, et ce n'est pas une surprise.
Bien isolée, confortable et correctement amortie, elle dispose de toutes les aides à la conduite du groupe (y compris la lecture de panneaux), même si l'on aurait apprécié des feux matrix LED sur long trajet. La conduite semi-autonome de Stellantis fonctionne bien, sans être au niveau de Tesla ou de Volkswagen, qui disposent de fonctions plus modernes (réalité augmentée, changement de voie etc.)
Problème, sans planificateur d'itinéraire, le stress de la panne sèche se fait rapidement sentir, même si en Europe, la plupart des aires sont aujourd'hui équipées de bornes. Reste que si je ne veux que du Ionity (car j'ai pris l'abonnement Power qui offre un kWh à prix réduit), j'aurais aimé que la voiture me guide de station en station.
Enfin, l'autonomie est un peu juste (200Km) pour réellement faire de longs trajets réguliers. Ça passe pour les vacances et un week-end de temps en temps, mais ces véhicules sont bien moins contraignants en thermique et c'est un vrai souci à ce tarif -beaucoup aimeraient en faire autre chose qu'une seconde voiture !
A partir de 34 800€
Alors, le costume italien parviendra-t-il à nous faire oublier qu'il s'agit là d'un énième clone à peine déguisé de la e208 ?
A choisir, je prendrais clairement l'italienne, plus originale, mieux finie à l'intérieur, même si le reste reste un brin clivant. Les équipes italiennes ont bien travaillé et ont réussi à maquiller la mariée sans fausses notes.
Comme chez Volkswagen, et contrairement au groupe BMW, je trouve que la différenciation entre les marques manque malgré tout de personnalité. Ici, on aurait aimé une motorisation spécifique, quelques petits bonus sur la partie électrique (PaC en standard, charge plus rapide, planificateur, One-Pédale....). Il suffit d'essayer la eCorsa et la e208 dans la foulée pour se rendre compte que les différences se jouent surtout dans le style, très peu sous la pédale.
Reste qu'à 34 800€ (de base, hors bonus), le tarif est salé pour l'entrée de gamme, d'autant que les options sont légion. A plus de 40 000€, on aurait aimé la pompe à chaleur de série, les feux matrix LED, un planificateur d'itinéraire ou encore la préconditionnement de la batterie en hiver.
Evidemment, beaucoup opteront pour des loyers plus acceptables, à condition de limiter son kilométrage annuel. Toute la question est maintenant de savoir si cette Ypsilon suffira à ressusciter Lancia, qui ne compte plus que quelques concessions en Europe -le réseau se développe. Espérons aussi que les futures Gamma et Delta sauront renouer avec les origines italiennes de la marque, et pas seulement pour le plumage.
Nos accessoires indispensables
Voici quelques accessoires que nous avons utilisés pour charger la voiture et notre iPhone à bord :