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Jailbreak evasi0n : une affaire de gros sous derrière une image de Robin des Bois ?

Par Didier Pulicani - Publié le

La mise à disposition du jailbreak d'iOS 6.x a généré pratiquement plus de buzz que lors de l'annonce du premier système de déblocage de GeoHot sur l'iPhone 1 ! Il faut dire que l'opération avait été jugée presque impossible à réaliser par quelques hackers renommés de la scène jailbreak, comme Stefan Esser, pour qui iOS 6 aurait pu se révéler quasiment inviolable.

Après une très courte période de pessimisme aigu, l'équipe d'evad3rs annonce finalement en grande pompe la sortie d'une solution publique de jailbreak Unthetered, la plus difficile à réaliser puisque le crack reste actif après redémarrage de l'appareil. La suite, on la connait tous : le programme sort, la communauté applaudit des deux mains et Apple se sent même obligée de réagir tant l'écho médiatique a été important ces derniers jours.

Jailbreak evasi0n : une affaire de gros sous derrière une image de Robin des Bois ?


Mais ce cher Stefan Esser trouve l'histoire un peu trop idyllique à son goût, lui qui connait bien le milieu du jailbreak et les aboutissants d'une telle solution grand public. L'homme est d'ailleurs aussi talentueux qu'hostile à l'usage du jailbreak, qui selon lui, fait beaucoup de mal à la communauté des éditeurs. Dans le cadre de notre affaire, ce qui le gêne avant tout, c'est la prétention systématique des auteurs du programme à clamer que l'argent ne les intéresse pas. Esser raconte, d'une part, que pour la sortie du crack sous iOS 5, l'équipe aurait obligé Musclenerd à intégrer un bouton de dons dans redsn0w, en échange de l'utilisation de leur code, une thèse qui renforce l'idée que le gain potentiellement généré ne leur est pas totalement étranger.

Pour, Esser, tout a été, au contraire, orchestré pour créer le buzz, et surtout, du trafic vers les serveurs de l'équipe de hackers. Depuis l'annonce de la disponibilité prochaine du logiciel, les evad3rs n'ont eu de cesse d'alimenter le buzz, en donnant régulièrement des infos sur l'avancement de l'opération. Mieux, l'équipe semble s'être répartie efficacement afin de donner un maximum d'interviews dans les médias généraux et spécialisés, afin d'alimenter la sortie d'evasi0n avec le plus de visibilité possible. Et ça marche ! 40 millions de pages vues et 10 millions de visiteurs auraient été enregistrés sur le site depuis la sortie d'evasi0n, clame Pod2g, le français de l'équipe. Lorsqu'on sait que 3 grosses bannières ornent les liens de téléchargement, on imagine que le gain potentiel reste élevé, même réparti entre les membres de l'équipe.

Mieux, durant la période précédant la sortie, la team se serait détachée en deux (dreamteam et chronic-dev), afin de maximiser les dons et sans préciser qui était réellement derrière l'exploit. En cultivant cette image de Robins des Bois, les evad3rs font surtout grandir leur capital sympathie auprès des utilisateurs, qui auront tendance à verser plus facilement quelques dollars à l'équipe. Pour Esser, il n'y a aucune honte à être rétribué pour un tel travail, mais c'est ici la méthode employée (On ne fait pas ça pour l'argent... Mais en fait, si, et on vous faire croire le contraire) qui l'énerve quelques peu.

Mais ce n'est pas tout lorsqu'on parle d'honnêteté intellectuelle de la bande : la méthode employée (que nous vous décrivions hier) ne serait en fait, pas totalement nouvelle. De nombreuses parties étaient déjà publiques ou semi-publiques, parfois même depuis longtemps. Esser estime qu'à aucun moment, l'équipe n'a mentionné avoir utilisé des méthodes découvertes par d'autres hackers, un façon de faire assez cavalière car chacune des étapes reste indispensable pour aboutir au jailbreak final.

Enfin, Esser estime que la pression derrière le jailbreak est trop forte pour remettre en cause la pertinence d'un tel travail : les sites d'actu jailbreak vivent de cette activité, Cydia également (évidemment), de nombreux chercheurs/développeurs ont besoin d'un jailbreak pour travailler et les utilisateurs (en majorité intéressés par les possibilités de piratage, clame Esser) ne viendront évidemment pas leur mettre des bâtons dans les roues.

Evidemment, certains ne manqueront pas de noter une nette prise à partie dans le billet de Stefan Esser. Reste que l'homme rappelle à juste titre, que le jailbreak fait vivre tout une économie parallèle, mais aussi qu'il est possible de "manipuler" les médias et les utilisateurs sous couvert d'un désir de liberté et de débridage, un activisme pas toujours aussi vertueux qu'on aimerait nous le présenter.