Test du Oakley Airwave 1.5, un masque de ski connecté avec affichage tête haute !
Par Didier Pulicani - Publié le
Mais est-il vraiment utile ? Quelles infos est-il capable d'enregistrer ? L'investissement est-il réellement justifié ? Nous allons tenter d'y répondre dans ce test complet, qui démarre -comme à l'accoutumée- par une petite vidéo (avec ma collègue Alex !).
Un mini-smartphone dans un masque de ski
Pour créer un masque de ski connecté, les pré-requis sont nombreux et l'on comprend aisément qu'il ait fallu attendre si longtemps pour voir débarquer un produit suffisamment abouti pour le grand public.
Oakley s'est donc associé avec un spécialiste de l'électronique et des systèmes d'affichage tête haute, Recon, une startup d'origine universitaire, rachetée par Intel en 2015 pour 175 millions de dollars. Dans cet AirWave 1.5, Oakley se contente donc de fournir le masque, mais tout ce qui nous intéresse se trouve en fait intégré par Recon, que ce soit l'écran, les capteurs, la batterie ou les services en ligne. Il est d'ailleurs présenté séparément sous la marque
Snow 2même si Oakley est (pour le moment) le seul partenaire mentionné sur les pages officielles (même si on retrouve le Snow2 dans quelques produits chez Smith et ZealOptics).
Le challenge a donc été d'arriver à caser un mini-smartphone dans un espace réduit et avec une autonomie suffisante pour une journée de ski. Notre modèle contient en effet un processeur bi-coeur, du WiFi, du Bluetooth, 1Go de RAM, 2Go de mémoire interne, un GPS, un accéléromètre, un gyroscope, un magnétomètre, un baromètre et un écran couleur en 428x240... Et tout ça tient dans seulement quelques millimètres carrés et 65 grammes !
L'ensemble se recharge en micro-USB, un port bien protégé par une coque en caoutchouc, qui permet d'afficher une bonne étanchéité.
Le masque est livré avec une housse et une petite télécommande bluetooth qui se fixe au dessus de la manche de l'anorak. Cette dernière fonctionne avec une pile bouton et communique avec le masque en bluetooth. Rassurez-vous, il n'y a pas besoin de la configurer ni de la synchroniser, encore moins de lui changer les piles entre deux sessions.
Une conception robuste mais un écran trop déporté
Oakley est un équipementier réputé dans le milieu sportif et cette image de marque est amplement méritée : l'AirWave respire la qualité à tous les niveaux ! Si vous avez déjà acheté des masques dont la mousse part au bout de quelques jours et où la vitre se remplit de buée après seulement 10mn de ski, ce modèle ne souffre d'aucun de ces maux !
Les mousses sont épaisses et robustes, et les plastiques d'excellente facture. La forme épouse royalement celle du visage, avec une sangle large et agréable, même sans bonnet. Quant à la buée, je n'en ai jamais eu durant mes vacances, malgré le temps variable.
L'électronique, elle, est bien cachée. Vu de l'extérieur, rien ne dépasse et il est même assez difficile de différencier l'AirWave d'un masque classique. En revanche, à l'intérieur, le système est réparti de chaque côté, avec un petit fil qui passe au dessus du nez. On retrouve le bouton d'allumage et le port de charge sur le côté droit, mais l'ensemble est parfaitement intégré et ne gêne en rien le port du masque.
L'écran, lui, n'est pas directement dans le champ de vision, il se trouve en fait au niveau du nez, ce qui oblige à baisser le regard pour l'apercevoir. Quand on m'a parlé d'
affichage tête haute, je m'attendais vraiment à un système comparable à ce que proposent les constructeurs automobiles sur le pare-brise de leurs voitures. En réalité, il faudrait plutôt parler d'affichage déporté sous le regard, que de vrai
HUDcomme dans les jeux vidéo.
J'en ai rêvé : voir ma vitesse en temps réel sur les pistes
Même si j'aurais effectivement préféré un affichage directement sur la vitre, je dois avouer que j'attendais avec impatience de pouvoir tester un jour ce type de fonctionnalités ! Tout skieur amateur de schuss et maitrisant un minimum son domaine adorerait savoir à quelle vitesse il skie. Evidemment, avec les GPS et les montres modernes, il est déjà possible d'avoir accès à ces informations, mais uniquement après coup (ou en prenant le risque de se faire mal...).
Cet AirWave 1.5 affiche donc en temps réel la vitesse (en Km/h), mais aussi la distance, le dénivelé, ou encore l'altitude. Il est possible de tout voir en même temps ou de se limiter à quelques données affichée en gros caractères (plus lisibles !), la place à l'écran étant comptée. Les informations fournies sont relativement fiables, même si la précision des données d'altitude (induite par la pression) dépendent beaucoup de la météo.
En randonnée, vous pouvez également activer une boussole sur laquelle vos amis sont visibles -à condition qu'ils possèdent le masque, l'application ad-hoc et qu'ils figurent parmi vos "amis".
A l'usage, ces fonctionnalités sont très plaisantes ! Même s'il faut baisser le regard, on aperçoit facilement sa vitesse au cours d'une descente, et ce, sans se mettre en danger. On peut alors aisément essayer d'exploser ses chronos avec ses amis ou optimiser ses parcours quotidiens par exemple.
L'affichage est lumineux et parfaitement visible, sauf si vous êtes juste dans l'axe du soleil. Là, l'écran apparait immaculé et il faut baisser la tête pour voir sa vitesse, ce qui n'est pas sans danger...
Attention tout de même à éteindre le masque à midi, puisque la dalle reste allumée en permanence ! Nous avons toutefois réussi à tenir une journée complète sans souci (9h-17h), et il restait encore 15/20% à 17H.
Des cartes à jour avec toutes les stations françaises
Même si l'interface est uniquement disponible en anglais, bonne nouvelle, les stations françaises (et suisses) sont parfaitement prises en charge ! (Voir la liste complète)
Ici, à Chamonix, on retrouve donc bien le Brévent, l'ensemble de ses remontées mécaniques et de ses pistes. Les cartes semble correctement mises à jour et l'on aperçoit même les couleurs (rouge, bleue, noire) de chaque descente.
La boussole permet de se positionner en temps réel, et la télécommande offre quelques contrôles, comme un zoom ou le déplacement de l'écran sur la carte.
A l'usage, ces plans ne sont pas d'une grande utilité dans les petites stations, surtout si on a l'habitude de les fréquenter. Mais sur les grands domaines, comme Tignes ou la Plagne, ça peut éventuellement dépanner (notamment en cas de gros brouillard ou de jour blanc par exemple).
Le bilan de ses performances quotidiennes
Lorsqu'on démarre sa journée, il faut connecter le masque à son iPhone via l'application Recon Engage. Cette dernière va alors synchroniser les données et démarrer vos activités. Notez qu'il est possible de s'en passer (pour préserver sa batterie par exemple) et de couper le bluetooth : le casque sera alors autonome et enregistrera les infos sur sa mémoire interne.
Une fois la journée terminée, vous pouvez retrouver toutes vos statistiques sur l'application : vitesse maximum, parcours détaillé, distance, dénivelé... A l'image des traqueurs d'activités, cela permet d'évaluer ses performances et son tracé, mais aussi sa progression entre le début et la fin des vacances par exemple. Attention, si la synchro est rapide, les données n'apparaissent pas dans l'app immédiatement, et il faut parfois attendre plusieurs jours pour que les serveurs s'activent ! Au début, je pensais à un bug, mais le support m'a confirmé ce décalage un peu désagréable.
Si Recon propose quelques fonctions sociales (partage de ses courses, ajout d'amis...), il faut bien l'avouer, le produit n'est pas encore assez répandu pour vraiment en profiter. L'application reste néanmoins bien faite et maintenue à jour par l'éditeur. Il existe même une version Mac (à télécharger ici) qui permet de synchroniser ses informations depuis un ordinateur (sans iPhone, donc) et les résultats seront alors visible sur le site de Recon.
Un "App Store" peu développé (mais avec quelques perles)
Puisque le Recon tourne sous Android, on peut potentiellement lui installer des apps. Mais la taille de l'écran et le petit CPU limitent un peu le champ d'action. Les interactions sont également limitées par la télécommande et ses 4 flèches, sont bouton retour et la validation.
Par défaut, il y a déjà de quoi faire : l'outil de cartographie, la gestion des mesures (vitesse, altimètre, dénivelé...), la boussole, les notifications et aussi la possibilité de naviguer dans sa musique. J'ai d'ailleurs trouvé cela assez pratique de pouvoir changer de piste (à condition d'avoir des écouteurs reliés à l'iPhone) mais aussi de recevoir ses SMS directement dans le masque !
Recon propose aussi un SDK, qui a permis de développer 17 apps (oui, seulement 17 !), dont la plupart n'ont aucun intérêt. On trouve quand-même quelques perles, comme celles de Garmin et GoPro, qui permettent toutes les deux de contrôler leurs caméras sportives en temps réel : avec les anciennes GoPro dépourvues d'écran, la solution est plutôt cool, même si la qualité d'image et la latence brident un peu les performances.
Verdict : utile ou gadget ?
Vendu ~550€, ce masque connecté devient enfin accessible au grand public (il était proposé à 700€ au lancement). Le budget donc reste élevé, c'est vrai, mais rapporté au tarif d'un masque équivalent (environ 150 à 200€ pour ce modèle) et de l'électronique embarqué (GPS, accéléromètre, Android...), ainsi que l'accès illimité aux services (gratuit), le montant total n'est finalement pas aussi excessif qu'il n'y parait.
Mais qu'en est-il des usages ? Est-ce vraiment utile de dépenser autant d'argent pour simplement voir sa vitesse sur les pistes ? La réponse dépend évidemment de vos pratiques sportives. En tant que passionné de ski et pratiquant régulier, j'ai pris beaucoup de plaisir à avoir ces informations en temps réel, mais aussi après-coup. En randonnée, l'altitude, l'orientation et le positionnement sont primordiaux et c'est finalement en dehors des pistes que je l'ai trouvé le plus utile ! Evidemment, faire péter le chrono et challenger ses journées est également très motivant dans les stations, surtout lorsqu'on aime la vitesse et les défis.
A l'image de l'Apple Watch, ce masque permet aussi de se passer de l'iPhone, puisqu'il affiche l'heure, ses notification et autorise même à prendre des appels sur les pistes sans devoir manipuler son smartphone ! Il n'est donc pas indispensable, mais on s'habitue très vite au confort de l'avoir sur le crâne. Finalement, c'est en remettant des lunettes de soleil (les jours de beau temps) qu'il m'a le plus manqué... D'ailleurs, je ne cracherais pas sur un système plus léger, évitant de devoir porter un gros masque en permanence. (Il existe bien la version Jet, mais elle se destine surtout aux cyclistes et aux coureurs...)
Avec cet AirWave 1.5, Oakley propose donc un masque connecté très bien fini, complet et avec finalement très peu de bugs. Je regrette simplement que la moulinettes des statistiques prenne parfois plusieurs jour à afficher vos performances sur l'iPhone, mais Recon nous a dit avoir investi dans de nouveaux serveurs, bien plus rapides pour calculer ces données.
Alors, on achète, ou on n'achète pas ? Difficile de répondre de manière tranchée à cette question, pour plusieurs raisons. La première, c'est que le hardware commence à vieillir un peu, et il serait temps qu'Oakley présente un nouveau modèle. On aimerait également voir arriver un vrai HUD directement sur la vitre, mais aussi un écran plus grand, et un CPU plus rapide. Pour autant, si vous l'achetez en 2017, le masque "fait le job" et ne souffre pas de grosse lacune en terme de réactivité, de fonctionnalité ou d'ergonomie (vous ne changez pas de compteur de voiture tous les ans, n'est-ce pas ?). Oakley n'a donc pas vraiment de raison de le mettre à jour si c'est pour offrir le même concept et proposer le même type de fonctionnalités.
En tout cas, après avoir essayé l'AirWave 1.5, ça ne fait pour moi plus aucun doute : ce type de dispositif en réalité augmentée va voir son prix baisser et se retrouver sur le plupart des masques du commerce d'ici 5 ou 10 ans.