Retenez les larmes, sortez malgré tout les mouchoirs, et ne lisez pas ce qui suit si vous êtes sujet à la déprime chronique ou déjà en possession de l'iPod Hi-Fi... Cette histoire n'est pas à mettre entre tous les claviers.
Lui
Les heures passaient, il était seul, abandonné de tous. Il restait là, sur le meuble du salon.
Son nom, il le signait à la pointe de l'octet d'un "i", qui voulait dire iPod Hi-Fi. Son achat avait été décidé lors d'une nuit d'orage alors que la vieille chaîne Hi-Fi venait de rendre l'âme. Un intermède de nuages fît apparaitre une Lune timide qui éclaira d'une lumière blafarde le bureau de Norbert. Et, dans la sépulcrale lueur qui emplissait la pièce, la carte bancaire fit son oeuvre. Sa sortie de boite, il s'en souvenait comme si c'était hier. D'ailleurs, c'était hier. Dans le paquet, il était en compagnie d'une petite boite noire contenant la télécommande, la prise électrique et des adaptateurs dont il ne comprenait pas la signification.
Tout ce qu'il savait ? Il était prêt à accueillir les désirs et satisfaire les attentes d'oreilles humaines. Le détail dont il était le plus fier ? Assurément les deux boutons de contrôle du volume sonore.
Même pas besoin d'une pression. Un simple effleurement, un soupçon de caresse, un presque geste d'amour, un délicat frémissement suffisait à activer la fonction. Le son montait à l'envie, sans effort, en prenant soin du délicat épiderme, pour culminer dans une explosion de décibels... Il pouvait descendre aussi. Tiens, pour le plaisir, une autre vue :
Autre particularité enviable qu'il se savait détenir : la qualité du son qu'il pouvait délivrer. De la plus profonde des basses à la plus cosmique des aigües, il savait provoquer l'émotion. Un son parfait pour sa catégorie, qui ne saurait cependant pas rivaliser avec un ampli et des enceintes d'un salon de mélomane même peu fortuné.
Et que dire de ces deux poignées ? Qui lui autorisent toutes les escapades, en des lieux aussi divers que variés (jardin, plage, pique-nique, sous-bois, forêt Amazonienne, cratère de volcan, cage d'escalier si la concierge est à la cave, Apple Expo...etc.) À noter que ces excapades ne se feront qu'au détriment des muscles du porteur. Un poids de 6,6 Kg à jeun, sans les piles (et sans parler des 7,6 Kg avec des piles) n'est du plus bel effet que pour faire saillir des muscles mis soudainement à rude épreuve et s'assurer un succès éprouvé auprès de représentantes du sexe dit opposé alors que principalement faible...
Et que dire de son compagnon de quiétude musicale ? La télécommande était là elle aussi. Elle attendait l'impulsion pour faire passer les désirs de celui qui ne venait pas.
Bon, par contre, notre iPod Hi-Fi se savait disponible à un prix élevé, mais avoir une pomme sur la coque, il paraît que cela n'a pas de prix chez certains ;p
Ainsi, donc, il était prêt à toutes les noces musicales, grâce également à l'entrée ligne sur sa face arrière, qui lui autorisait tout branchement audio, quelque soit la source... Mais personne ne venait. Pas le moindre décibels. Pas la moindre onde musicale. Rien... Jusqu'à ce jour-là.
Elle
Elle venait du fin fond du monde. Elle avait traversé le monde connu, navigué sur des mers déchaînées, franchi des montagnes infranchissables pour venir en ce lieu, suite à une commande sur l'Apple Store OnLine Français.
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Sa seule fonction était de fournir de la musique à celui qui le souhaitait par l'intermédiaire de ses écouteurs. Tache ingrate, mais dont elle savait s'acquitter avec entrain, joie et conviction. Sa robe noire avait su séduire. Son aptitude éprouvée à engluer les tympans de musicalité ambitieuse ou aléatoire dans la qualité forçait le respect et l'envie d'achat. Tout allait bien et rien ne semblait la distraire de sa mission. Jusqu'à ce jour-là.
Eux
Ce jour-là était un Jeudi. Ou un Vendredi. Enfin le lendemain de l'arrivée d'iPod Hi-Fi et un jour ouvrable où un livreur est susceptible de livrer. Le livreur, donc, stoppa son camion au numéro 22, il sortit, s'approcha d'un pas voluptueux et anodin dans le déhanchement et appuya sur le bouton de la sonnette qui déclenchât une impulsion électrique, signal que reçut la sonnette qui, prompte à réagir, fît Toc, toc.
[q[P]**[ de b]*[ de m]*[, qui c'est qui vient me faire c]*[ à cette heure ? s'exclama Norbert (c'était le nom du propriétaire d'iPod Hi-Fi), toujours surprenant dans la distinction raffinée de son quart d'heure dinatoire. Il enfourcha ses charentaises, et vogua d'un pas lourd et totalement quelconque vers la porte d'entrée. L'iPod Hi-Fi observait la scène depuis son dessus de meuble. Norbert (c'était toujours son nom, malgré les deux lignes trépidantes que nous venons de vivre) savait être hors norme dans ses moments de concentration ultime de célibataire endurcit par les années de solitude. Cela amusait fortement iPod Hi-Fi.
Norbert, plus distrait qu'un eunuque en présence de Monica Belluci, avait oublié sa commande. Son iPod 30 Go ébène arrivait enfin. Et là, ce fût le choc. L'indicible cataclysme qui fit chavirer l'âme d'iPod Hi-Fi au plus profond de ses circuits électriques. La sortie de boite se déroula sans soucis technique, ni problèmes d'intendance. Tout était là, les écouteurs, le cable USB, les CD... tout semblait aller pour le mieux et sur des roulettes sur l'Autoroute n°69 en direction du bonheur éphémère qui nous surprend alors que nos coeurs s'envolent vers les sommets du septième ciel où le plaisir de surplomber les sots le dispute à celui d'éviter le face-à-face avec sa télé le samedi soir. Elle commencait juste à appréhender son nouvel environnement et, après un moment de chargement et de synchronisation avec le Mac, elle vint se connecter au-dessus d'iPod Hi-Fi.
La connexion fût indescriptible.
Ce fut la communion de deux êtres que tout oppose mais dont l'osmose devenait, subitement, inaltérable, ce fut un champ de coquelicots en plein désert, ce fut un camion de Cupidon à un péage d'autoroute un 15 Août caniculaire, bref ça collait grave entre eux.
La perfection de l'inclinaison qui suivit leur union en a inquiété plus d'un, ils furent nombreux à chercher jusque dans les astres les raisons d'un tel degré, le pourquoi d'une telle inclinaison, le comment de cet angle inconcevable. Mais rien. Hasard, coïncidence fortuite, ou inclinaison divine, la perfection sait ne pas offrir une explication lorsqu'elle atteint, du bout de l'octet, le divin.
La musique de Norbert étant cruellement peu propice à ces moments d'extatique enchévêtrement de circuits électriques, force nous est de constater que le manque de violon est cruel pour ces moments langoureux. Ils s'imaginèrent donc leur partition. Les envolées lyriques frôlent les plus fous aiguës des violons, les contrebasses et violoncelles profondisent à l'unisson, le reste de l'orchestre suit le mouvement, et larmoyise à profusion. Ce fut le bonheur d'un Lacrymosa romantique.
C'est ainsi que les jours, les semaines, les mois passèrent (Et on aurait aimé que la télécommande puisse permettre de se ballader dans les menus de l'iPod, ce qu'elle ne permet pas !) Puis l'Été vint.
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Un beau matin de Juin, le facteur sonna toujours deux fois toc !, ce qui provoqua un Toc, toc ! froid et glacial. Paradoxal en cette saison. Il amenait un paquet, qui se trouva être rempli d'un séduisant exemplaire issu de l'imagination débordante des ingénieurs de Logitech : Le mm50.
Le Logitech mm50 resplendissait des mêmes fonctions que l'iPod Hi-Fi : Matérialiser du son en provenance de l'iPod, de qualité certes moindre mais avec son lots de bonnes surprises, comme celle venant des basses, restituées de façon surprenante, comme celle venant du petit bouton restituant un son plus enveloppé dit 3D qui amplifie l'effet stéréo. Surprise, également, en provenance de la télécommande présente...
... de sa capacité à recharger les batteries d'Elle, du connecteur Dock présent sur l'arrière qui permet la synchronisation avec le Mac...
... et de cette aptitude à la légèreté, beaucoup plus apte au déplacement, voyage et autres joyeusetés promenatoires, housse de transport incluse.
Aptitude qui n'inquiéta pas, au premier abord, iPod Hi-Fi...
Certains petits défauts participaient à son charme...
Certains signes avant-courreur auraient dû alarmer iPod Hi-Fi. Pourtant, il ne vit rien dans leurs jeux, même lorsqu'ils participaient aux chasses du chat :
L'Été, donc, vint.
L'Été étant la saison des vacances, Norbert décida de partir en voyage. Il prépara son sac. Prit ses tongs, des shorts pour les prêter à Grouik, ses chaussettes, son iPod et... son mm50.
L'iPod Hi-Fi les regarda partir, le coeur déchiré par la détresse, la coque secouée de soubresauts de désespoir. Sa chère et tendre partait au loin sans lui. Il ne pût en supporter plus. Il tira sur le câble d'alimentation. Il savait pouvoir tenir longtemps grâce aux piles qui l'alourdissaient certes d'un bon kilo, mais le mal était nécessaire. Il s'évada pour retrouver iPod. Mais le bus s'en allait déjà au loin dans le crépuscule de cette journée à oublier et de cette niouse dont on se demande comment l'auteur va pouvoir finir. Il chercha longtemps (pas l'auteur au sujet d'une fin, mais iPod Hi-Fi... Suivez un peu...), naviguant d'hôtel miteux en camping improbable. Errant au hasard des rumeurs et murmures qui se chuchotaient sur son passage.
On le vit partout...
En tous points du monde connu où ss coque plastique pouvait le mener...
Ici...
Là...
Ailleurs...
Puis ce jour vînt. C'était le 25 Juillet. Il aurait pu s'en souvenir des siècles, si le temps lui en avait laissé le temps. Il les trouva, là, connectés l'un à l'autre dans un hôtel lugubre. Sa coque tressailli. Ses hauts-parleurs vibrèrent de haine. Une faille inhumaine de désespoir lui ouvrit le haut-parleur gauche alors que celui de droite émit un biiip lugubre. Le cataclysme fut indescriptible.
On ne le revit plus jamais. Certains disent l'avoir aperçu une nuit d'orage sur un bord de chemin désert, seul, détruit... La photo suivante n'a jamais été officiellement authentifiée, mais le photographe affirme que c'est bien lui, ou ce qu'il en reste :
N.B. : Conscient que l'attribution des sexes dans cette fable peut en dérouter certains, je ne tolérerai aucune remarque à ce sujet. Cette fable poétique n'ayant elle-même aucun sens, comment voulez-vous en trouver un pour l'attribution des sexes ?
Pour le plaisir, le seul effet spécial de cette aventure :
