Le programmeur qui ne veut pas de VLC sur iOS s'explique
Par Arnaud Morel - Publié le
Les débats font rage depuis qu'un des programmeurs de VLC, Remi Denis-Courmont, s'est offusqué, tardivement, de la sortie de VLC pour iOS. Cause de la colère, une incompatibilité entre la licence GPLv2, utilisée par VLC, et les conditions d'utilisation et l'accord de licence App Store. La question, notamment, des limitations à l'installation de VLC sur 5 périphériques liés à un même compte iTunes pose problème.
Remi, qui a écrit à Apple pour indiquer sa position, estime que VLC ne devrait pas se retrouver sur les rayonnages de l'App Store. Sa position, cependant, est loin d'être partagée par toute l'équipe de VLC, logiciel Open Source. Le président de l'association VideoLAN, Jean-baptiste Kempf, par ailleurs contributeur important au code de VLC, estime que la question
Il s'agit des conditions d'utilisations de l'AppStore. Entre autres, elles semblent interdire la copie sur plus de 5 iDevices, et l'utilisation commerciale des produits logiciels.
Imaginons que vous ayez un iPhone - à titre personnel. Apple veut vous interdire d'utiliser VLC ou toute autre application dans un cadre professionnel - ou même étudiant. Par exemple, vous ne pouvez pas lire une vidéo envoyée si vous vous comptez vous en servir comme source pour un reportage.
C'est une idée intéressante, mais elle ne concerne qu'une partie du problème. Les termes de l'accord d'utilisation de l'AppStore comportent deux parties problématiques: l'accord de license de l'utilisateur final (EULA en Anglais), et les conditions d'utilisation ("Usage rules"). Si MobileVLC avait sa propre "EULA" plus relaxe que celle d'Apple, alors l'EULA d'Apple ne s'appliquerait pas. Mais les conditions d'utilisation s'appliquent dans tous les cas.
Bref, Apple uniquement peut rectifier ce problème en modifiant les termes.
Vous présumez qu'il faut résoudre les divergences. C'est vrai quand il s'agit de désaccord sur des aspects techniques. Mais ce n'est pas le cas ici.
Pour les divergences d'opinion, JB est président de l'association qui gère le site Web, les marques, les donations. Il a donc le dernier mot sur ces points, mais aussi une responsibilité autant morale que légale.
En ce qui concerne les droits d'auteur, l'association est hors jeu - elle n'en possède aucun. Chaque développeur est détenteur de son bout de propriété du code source du VLC, et n'a de compte à rendre à personne. Évidemment, on peut toujours débattre et chercher un accord. Mais, chacun est ultimement libre de s'exprimer et d'agir en fonction de ses convictions propres à titre personnel.
Je n'ai reçu ni aide ni consigne de mon employeur.
Trivialement, j'étais en voyage à ce moment-là. Ensuite, j'ai laissé quelques jours à Apple pour s'expliquer poliment avant de me plaindre formellement.
On le voit, le débat est juridique autant que politique. Remi adopte une posture offensive d'avocat du logiciel libre, en tant que contre-modèle au tout commercial. Apple, de son côté, n'en a cure. Cupertino a simplement accusé réception de la plainte de Remi et l'a transmise à Applidum, s'estimant non concernée plus avant. Les utilisateurs, par contre, peuvent avoir le sentiment d'être un peu pris en otage dans ce conflit. Que va-t-il advenir de VLC iOS ? Difficile de le dire aujourd'hui.
Deux hypothèses semblent baliser le sujet : soit Applidium, qui a réalisé le portage de VLC, retire purement et simplement l'application, soit elle y intègre ses propres conditions d'utilisations, chose permise par Apple tant que celles-ci ne contredisent pas ses propres règles, et réussit à calmer les plus énervés. Pour l'heure, aucun des protagonistes de cette histoire n'est en mesure de dire de quel côté la balance va pencher. À suivre.
Remi, qui a écrit à Apple pour indiquer sa position, estime que VLC ne devrait pas se retrouver sur les rayonnages de l'App Store. Sa position, cependant, est loin d'être partagée par toute l'équipe de VLC, logiciel Open Source. Le président de l'association VideoLAN, Jean-baptiste Kempf, par ailleurs contributeur important au code de VLC, estime que la question
est politiquetout en reconnaissant l'existence de vraies questions juridiques
qui ne pourront être tranchées que par un juge. Il a publié un long billet pour détailler sa position. Pour bien comprendre l'enjeux des débats, les divers contributeurs au code de VLC gardent leur droit de regard sur ce morceau de code et ont, à ce titre, leur mot à dire sur les développements de VLC. C'est en ce sens que Remi Denis-Courmont peut parvenir à faire retirer VLC de l'App Store.
Remi travaille chez Nokia et déteste tout ce qui se passe chez Apple, tacle Jean-Baptiste qui craint que cette affaire ne conduise à
l'éclatement de l'équipe de VLC. Repris par la Free Software Fondation, les griefs de Remi, méritent en tout cas d'être détaillés. Il a accepté de répondre à nos questions et voici son interview.
Remi Denis-Courmont répond à nos questions
Quel aspect précis de la licence GPLv2 vous apparaît problématique au regard des conditions d'utilisations d'iOS ?
Il s'agit des conditions d'utilisations de l'AppStore. Entre autres, elles semblent interdire la copie sur plus de 5 iDevices, et l'utilisation commerciale des produits logiciels.
Imaginons que vous ayez un iPhone - à titre personnel. Apple veut vous interdire d'utiliser VLC ou toute autre application dans un cadre professionnel - ou même étudiant. Par exemple, vous ne pouvez pas lire une vidéo envoyée si vous vous comptez vous en servir comme source pour un reportage.
Que pensez-vous de la réponse de Jean-Baptiste Kempf considérant, en substance, que les conditions d'utilisation de VLC peuvent être ajoutées à celles d'Apple, tout en reconnaissant que cette question reste "dans une zone grise", à savoir sujette à interprétation ?
C'est une idée intéressante, mais elle ne concerne qu'une partie du problème. Les termes de l'accord d'utilisation de l'AppStore comportent deux parties problématiques: l'accord de license de l'utilisateur final (EULA en Anglais), et les conditions d'utilisation ("Usage rules"). Si MobileVLC avait sa propre "EULA" plus relaxe que celle d'Apple, alors l'EULA d'Apple ne s'appliquerait pas. Mais les conditions d'utilisation s'appliquent dans tous les cas.
Bref, Apple uniquement peut rectifier ce problème en modifiant les termes.
Comment se solutionne une divergence au sein de l'équipe de VLC ?
Vous présumez qu'il faut résoudre les divergences. C'est vrai quand il s'agit de désaccord sur des aspects techniques. Mais ce n'est pas le cas ici.
Existe-t-il une procédure particulière ?
Pour les divergences d'opinion, JB est président de l'association qui gère le site Web, les marques, les donations. Il a donc le dernier mot sur ces points, mais aussi une responsibilité autant morale que légale.
En ce qui concerne les droits d'auteur, l'association est hors jeu - elle n'en possède aucun. Chaque développeur est détenteur de son bout de propriété du code source du VLC, et n'a de compte à rendre à personne. Évidemment, on peut toujours débattre et chercher un accord. Mais, chacun est ultimement libre de s'exprimer et d'agir en fonction de ses convictions propres à titre personnel.
Vos liens avec Nokia ont-ils influencé votre billet ?
Je n'ai reçu ni aide ni consigne de mon employeur.
Pourquoi avoir réagi aussi tardivement, plusieurs semaines après la sortie de VLC iPad ?
Trivialement, j'étais en voyage à ce moment-là. Ensuite, j'ai laissé quelques jours à Apple pour s'expliquer poliment avant de me plaindre formellement.
Et VLC alors, disparaîtra, disparaîtra pas ?
On le voit, le débat est juridique autant que politique. Remi adopte une posture offensive d'avocat du logiciel libre, en tant que contre-modèle au tout commercial. Apple, de son côté, n'en a cure. Cupertino a simplement accusé réception de la plainte de Remi et l'a transmise à Applidum, s'estimant non concernée plus avant. Les utilisateurs, par contre, peuvent avoir le sentiment d'être un peu pris en otage dans ce conflit. Que va-t-il advenir de VLC iOS ? Difficile de le dire aujourd'hui.
Deux hypothèses semblent baliser le sujet : soit Applidium, qui a réalisé le portage de VLC, retire purement et simplement l'application, soit elle y intègre ses propres conditions d'utilisations, chose permise par Apple tant que celles-ci ne contredisent pas ses propres règles, et réussit à calmer les plus énervés. Pour l'heure, aucun des protagonistes de cette histoire n'est en mesure de dire de quel côté la balance va pencher. À suivre.