La fin du port mini-jack : casques plus chers, quel standard et quid de la qualité ? (opinion)
Par Didier Pulicani - Publié le
Sur ces modèles, le seul connecteur disponible pour écouter de la musique, c'est l'USB C :
Un pari risqué
S'il se profile que l'iPhone 7 pourrait lui aussi faire l'impasse sur le mini-jack, il est finalement assez rare de voir des constructeurs Android se montrer aussi avant-gardiste en supprimant une connectique si standard, prenant ainsi le risque de perdre des clients déjà difficile à convaincre (la concurrence est nettement plus rude côté Google). Il faut dire que le nombre de casques compatibles USB C est encore ultra-limité, et l'on ne devrait pas voir les grandes marques s'y mettre avant une 6 à 12 mois minimum !
Pour le consommateur qui a déjà investi dans de coûteux modèles, la pilule sera difficile à avaler, bien qu'il soit toujours possible d'utiliser des adaptateurs. Sachant que l'on garde souvent ses casques audio plusieurs années, et que les modèles de moyenne gamme coûtent déjà une bonne centaine d'euros, pas sûr que l'audiophile soit prêt à racheter dès à présent un téléphone incompatible avec tous ses vieux Sennheiser, Bose et autres AKG achetés au prix fort... Mais l'inverse est également valable : il existe aujourd'hui quantité de matériel (baladeurs, consoles portables, télévision, amplis...) qui intègrent et continueront d'intégrer une prise jack, sur lesquels un casque
numériquene pourra pas se brancher simplement.
Lightning ou USB C ?
La question est également de savoir quel sera le prochain standard. A ce petit jeu, Apple joue gros en n'adoptant pas l'USB C sur ses téléphones. Certes, le lightning a déjà un peu d'avance sur la concurrence, puisque les casques compatibles existent depuis un petit moment maintenant et la fiche technique a été pensée dès le départ pour véhiculer l'audio et les informations correspondantes.
Côté USB C, Intel ne s'est penché que très récemment sur la question. Certes, l'USB a toujours permis de transmettre le son mais avec l'USB-C audio, la connexion se fera plus facilement et avec des spécifications plus complètes. Problème, Intel n'en est encore qu'en phase de développement, et il faudra sans doute attendre quelques mois (voir plusieurs années) avant que l'industrie n'embrasse réellement la technologie.
Reste qu'à terme, si l'ensemble du parc Android adopte effectivement l'USB C pour l'audio, la Pomme risque de se retrouver bien seule avec son connecteur propriétaire. Il n'y a qu'à voir aujourd'hui la jungle entre les prises mini-jack, dont certaines ne permettent pas de contrôler la télécommande des iPhone ou d'accéder au micro, la faute à un manque de standardisation de ce connecteur créé dans les années 60. Pour faire simple, si un format
USB Audiose généralise, les casques et les téléphones vendus actuellement pourraient se retrouver déjà obsolètes...
Une explosion des prix, mais quid de la qualité ?
Mais le plus fâcheux, côté consommateur, c'est bien évidemment le problème du DAC. Derrière ces trois lettres se cache un convertisseur numérique-analogique, une petite puce indispensable qui permet de transformer le son en signal lisible par des écouteurs, par définition analogique. Actuellement, ce processeur est intégré aux smartphones (et aux Mac) via leur carte-son (désormais souvent intégrée au SoC). Quand vous entendez certains critiquer l'iPhone pour sa qualité sonore, on parle ici des capacités du DAC à traiter et transformer le plus fidèlement possible le signal numérique.
En supprimant le convertisseur numérique-analogique, ce sera donc aux constructeurs de casques et d'écouteurs d'intégrer la puce à leurs produits. Si certains s'en réjouissent -cela permettra aux marques de proposer un meilleur traitement du signal- il faudra donc rajouter de l'électronique dans les écouteurs, y compris les petits modèles pas chers,. Sur le haut-de-gamme, on pourrait donc gagner en qualité, à condition d'avoir des fichiers à la hauteur et une excellente oreille. Mais sur l'entrée de gamme (et certains milieu de gamme), voilà que pourrait se produire l'effet inverse : afin de ne pas vendre les modèles USB C ou Lightning trop chers par rapport aux versions analogiques, les constructeurs pourraient opter pour des DAC de qualité moindre que celui qui est actuellement présent dans l'iPhone ! N'oublions pas non plus que pour le cas du lightning, les fabricants doivent aussi acheter les connecteurs, et verser une dime à Apple pour la certification MFi !
Une fausse bonne idée ?
Si le numérique est arrivé dans l'audio bien plus rapidement que dans la vidéo (rappelez-vous des premiers magnétoscopes VHS avec son numérique nicam stéréo, une révolution !), c'était surtout pour éviter les pertes au moment de la transmission, mais aussi car la bande passante nécessaire est nettement moins élevée qu'en vidéo. En revanche, sur le matériel de diffusion en bout de chaine (enceintes, casques, amplis, autoradios...), l'analogique est encore loin d'avoir dit son dernier mot !
Le retrait du port jack semble désormais inéluctable, pour des raisons tout à fait louables sur le papier. Gain en qualité, simplification des connectique,des smartphones plus fins... N'oublions pas non plus qu'un signal numérique permettra de transporter d'autres informations, comme le nom des pistes, ou même intégrer des capteurs sur les casques (gyroscope, etc.). Enfin, avec l'explosion des casques sans fil, avec une meilleure autonomie et l'arrivée de normes bluetooth plus performantes, le filaire est peut-être aussi en train de disparaitre progressivement, du moins, en mobilité.
A l'inverse, la liste des inconvénients est au moins aussi longue. Comment, par exemple, recharger son iPhone tout en écoutant de la musique ? Sans adaptateur, cela semble compliqué. L'autre point, c'est qu'à moins d'avoir des oreilles bioniques, un casque restera toujours un produit analogique. Déplacer le DAC vers les écouteurs ne changera pas la finalité, sauf à venir complexifier sa construction (et à faire grimper les prix). Enfin, le sans-fil est encore loin d'avoir remplacé les connecteurs, pour de multiples raisons : latence trop élevée, problèmes d'autonomie, batteries encore lourdes... et même souvent une qualité moindre, à cause de la compression. Bref, le bon vieux filaire à l'ancienne restera toujours un modèle de fiabilité.