Ce mardi 25 février, un album des plus inédits a vu le jour au Royaume-Uni. Intitulé Is This What We Want?, il réunit plus de mille artistes parmi lesquels figurent Damon Albarn, Kate Bush, Annie Lennox, The Clash ou encore Hans Zimmer. Sa particularité est est d'être entièrement silencieux, telle une marche muette pour protester contre un projet de loi britannique en matière d'IA.
Il n'y pas de mots pour le dire...
Le but de cette œuvre muette est de dénoncer un projet de loi britannique qui autoriserait les éditeurs d’intelligence artificielle musicale à entraîner leurs algorithmes sur les chansons des musiciens britanniques, et ce, sans leur consentement explicite. Autrement dit ce texte permettrait un accès libre par défaut, à moins que les artistes ne fassent eux-mêmes la démarche de retrait (opt-out).
En pratique, qu'est ce qu'un album muet ? En effet, les douze pistes ne comportent aucun son, mais leurs titres -une fois assemblés- forment une phrase : The British Governement Must Not Legalise Music Theft To Benefit AI Companies (Le gouvernement britannique ne doit pas légaliser le vol de musique au bénéfice des entreprises d’IA).
Une mobilisation artistique et médiatique sans précédent
Cette action coup de poing ne s’arrête pas à la musique. Parallèlement à la sortie de l’album, une trentaine d’auteurs et de musiciens -dont Elton John, Sting et Dua Lipa- ont signé une lettre ouverte dans The Times, critiquant une réforme inutile et contreproductive.
Le mouvement a pris une telle ampleur que plusieurs des principaux journaux britanniques (The Daily Mail, The Sun, The Guardian et The Daily Telegraph) arboraient à leur une, un message uni écrit en noir sur fond bleu, avec deux lettres mise en exergue : Make it Fair (Faites que cela soit juste).
Ed Newton-Rex, coordinateur de l’album et figure emblématique du milieu de l’IA musicale, ne mâche pas ses mots dans la presse. Ancien patron de Jukedeck -une start-up de musique générative rachetée par TikTok en 2019- et fondateur du label Fairly Trained en 2024, il dénonce un système biaisé : Avec ce projet de loi gouvernemental, les musiciens nationaux abandonneraient une vie de travail aux éditeurs d’IA, gratuitement, les laissant exploiter leur œuvre pour les surpasser. Il souligne aussi l’inefficacité du mécanisme d’opt-out, expliquant que même les meilleures procédures de retrait restent méconnues et inaccessibles pour la majorité des artistes.
Une réforme pour séduire les géants de l’IA
Ce projet de loi s’inscrit dans une stratégie plus large du gouvernement travailliste, qui ambitionne de faire du Royaume-Uni un « leader mondial » de l’intelligence artificielle. Annoncé en janvier, le plan d’action prévoit d’attirer les entreprises d’IA en leur offrant un terrain d’expérimentation, avec des régulations minimales et une liberté quasi totale dans l’entraînement de leurs modèles.
Cependant, cette approche suscite une vive opposition, non seulement chez les musiciens, mais aussi chez les auteurs littéraires et les artistes visuels, également concernés par le texte.