J’ai acheté un iPhone Air bleu ciel. Enfin, « bleu » sur le papier. En réalité, ce téléphone est surtout blanc comme un cul. Je m’étais déjà fait avoir avec le MacBook Air M4, soi-disant bleu ciel lui aussi, mais qu’on confondrait facilement avec un modèle argent. Est-ce qu’Apple a un vrai problème avec la couleur ? Plus précisément, avec le bleu ?
J'ai posé des trucs bleus à côté de mon MacBook Air et de mon iPhone Air "BLEU CIEL", juste pour voir si je n'étais pas complètement zinzin
À force de jouer sur les nuances subtiles, la marque semble incapable d’assumer franchement une couleur vive. Et ce n’est pas nouveau. Retour sur une relation compliquée entre Apple et les couleurs, du logo arc-en-ciel à l’iMac G3, jusqu’aux produits récents aux teintes à peine perceptibles.
Mon iPhone Air BLEU CIEL à côté de mon MacBook Air BLEU CIEL lui aussi (photo prise avec un iPhone 16 Pro Max, zéro retouche)
Une histoire de couleurs très contrôlée
Apple a commencé fort avec la couleur. Dès la fin des années 70, le logo arc-en-ciel affichait clairement la volonté de la marque de se démarquer dans un univers informatique encore très beige. Ce n’était pas qu’une posture marketing : le premier Apple II permettait déjà d’afficher des couleurs à l’écran, ce qui était loin d’être courant à l’époque. Mais il a fallu attendre l’iMac G3 en 1998 pour voir Apple appliquer cette logique à son hardware.
iMac G3
Avec le Bondi Blue, un bleu turquoise translucide, l’ordinateur devenait un objet de design à part entière. Ensuite, d’autres teintes apparurent : Blueberry, Grape, Lime, Strawberry… Du chatoyant qui marquera durablement l’image de la marque.
Fini le fun des années 80-90
La transition vers la sobriété
À partir du début des années 2000, Apple commence à calmer le jeu. Le plastique translucide fait place à des matériaux plus sobres, plus opaques. Les iMac changent de design, la gamme portable s’uniformise autour du blanc et du gris. Le logo arc-en-ciel disparaît en 1998, remplacé par un logo monochrome.
Aujourd'hui, Apple appellerait peut-être cette couleur "Bleu pétard"
C’est aussi l’époque où l’aluminium devient la matière phare, et marque une rupture esthétique et symbolique. Le design devient plus mature, plus « professionnel », mais aussi beaucoup moins coloré. À quelques exceptions près, comme les iBook colorés ou les iMac à motifs très discutables de 2001, la couleur se fait plus rare, et surtout plus discrète.
C'est ça qu'on veut !
L’iPod, parenthèse colorée assumée
Paradoxalement, c’est peut-être avec l’iPod qu’Apple a été le plus audacieux sur la couleur. Si les premiers modèles étaient en plastique blanc immaculé, la gamme s’est rapidement diversifiée. L’iPod mini de 2004, par exemple, était proposé en cinq teintes franches : bleu, vert, rose, or et argent. L’iPod nano a continué sur cette voie, avec des déclinaisons très marquées, comme le rouge (édition Product RED), le violet ou le jaune vif.
La couleur était même au centre de la communication chez Apple
Le modèle de 2008 en aluminium anodisé, en particulier, proposait une vraie palette pop qui tranchait avec la sobriété des autres produits Apple. Même l’iPod Shuffle a eu droit à ses couleurs acidulées. À cette époque, la couleur était un vrai argument de vente, assumé, visible, sans détour marketing. Et surtout, le bleu était… vraiment bleu.
Des retours discrets
Avec l’arrivée des puces Apple Silicon, Apple tente un retour à la couleur. L’iMac M1 en 2021 s’affiche en sept teintes différentes, un clin d’œil aux débuts multicolores de l’iMac G3. Mais la comparaison s’arrête là : les couleurs sont beaucoup plus sages, pastel, tirant souvent vers des teintes désaturées.
iMac M1 de 2021, le bleu commence à franchement se délaver
Le dos est coloré, mais l’avant est plus pastel, ce qui donne un rendu visuellement très différent. Même chose pour mon MacBook Air M4 (testé ici) : Apple parle de « Bleu ciel », mais il faut un bon éclairage et une certaine dose d’imagination pour le distinguer d’un modèle argent. L’effet est subtil, et il déçoit clairement ceux, comme moi, qui s’attendent à...du bleu.
En fait c'est pas du "Bleu Ciel", c'est du "Bleu Ciel au Havre en novembre"
Un bleu qui fait débat
Ce flou artistique autour des couleurs commence même à agacer. Sur les forums comme Reddit ou dans la presse spécialisée (genre nous), les témoignages sont légion : le bleu vendu n’est pas le bleu reçu. Sur le MacBook Air M4, certains testeurs et utilisateurs (comme moi) parlent d’un gris avec une touche bleutée visible uniquement en plein soleil.
Il est déjà un peu plus bleu sur les visuels
Même chose sur certains iPhone récents, où les coloris annoncés comme bleus, verts ou jaunes apparaissent très délavés en conditions réelles. Ce décalage entre le marketing et la réalité visuelle crée une frustration bien réelle.
"Quatre finitions sublimes", hum hum
La philosophie esthétique d’Apple
Pourquoi ce choix de rester dans la nuance ? D’abord, il y a des contraintes techniques : sur de l’aluminium anodisé, la couleur dépend énormément de la lumière ambiante. Ensuite, il y a une volonté esthétique : Apple veut rester sobre, élégante, intemporelle.
Compliqué de coloriser l'aluminium anodisé ?
Des produits trop colorés vieillissent mal visuellement, surtout dans un contexte professionnel. La marque semble donc jouer la carte de la prudence, quitte à décevoir les amateurs de teintes rigolotes. C’est un choix cohérent sur le plan du design global, mais qui est franchement lassant. Car entre le « Sky Blue » à peine visible et le « Midnight » qui vire au noir, on finit par se demander si la couleur n’est pas là uniquement pour la fiche produit.
Les iPhone 13 avaient pourtant deux beaux bleus très tranchés ! (visuel : Technomentary sur Youtube)
Un vrai manque d’audace ?
Le problème n’est pas tant qu’Apple ne fait pas de couleur, mais qu’elle ne l’assume plus vraiment. À une époque où la concurrence mise sur l’identité visuelle forte, Apple veut tout lisser, tout uniformiser. Or, ce n’est pas ce que certains clients attendent. Ceux qui choisissent un iPhone ou un MacBook « bleu » veulent du bleu, pas un gris bleuté qu’on devine uniquement entre 14h12 et 14h17 sous un soleil dégagé entre Rodez et Albi, en plissant les yeux.
Voilà ce que demande le peuple ! (enfin moi surtout)
Et quand on se souvient des iMac colorés de la fin des années 90, difficile de ne pas ressentir une petite nostalgie pour une époque où Apple osait un peu plus. Même si oui, je sais ce que vous allez me dire, l’iPhone 17 Pro orange de cette année est quand même sacrément orange, presque trop… Comme quoi c’est possible de tirer le curseur de la couleur un peu fort, et il y a peut-être même un juste milieu non ?
En fait tout le budget peinture de 2025 est passé dans le orange (y avait des promos peut-être allez savoir)
Conclusion
Apple sait faire de la couleur, mais ne le veut pas vraiment. Le bleu est un mirage depuis quelques années : évoqué, suggéré, mais rarement visible de façon franche. Ce flou agace, d’autant plus qu’il donne l’impression d’un marketing un peu hypocrite. Si la marque veut reconquérir ceux qui aiment le design mais aussi la personnalisation, elle devra peut-être arrêter de jouer avec la lumière et proposer enfin des couleurs variées, qu’on reconnaisse sans devoir pencher l’écran ou sortir en plein soleil.
Bon et vous, vous avez envie de couleur sur votre matos Apple ? Ou le gris-blanc-nuage-pastel-délavé ça vous convient bien ?